Le Surréalisme dans l’art Américain

(Jusqu’au 26-09-2021)

L’exposition Le Surréalisme dans l’art Américain du Centre de la Vieille Charité de Marseille retrace l’histoire de la présence d’un courant surréaliste dans l’art américain, des années 1930 à la fin des années 1960, au lieu de répéter la légende selon laquelle les artistes new-yorkais auraient été bouleversés par l’arrivée des surréalistes parisiens en exil, qu’ils s’en seraient servi pour inventer un art proprement américain, l’expressionnisme abstrait, dépassant le surréalisme et le reléguant à un passé bien délimité. Le parcours s’ouvre par la présence à Marseille, en 1940-1941, d’un groupe d’artistes surréalistes attendant autour d’André Breton un départ prochain pour les États-Unis. Réunis à la Villa Air-Bel ou y passant, Victor Brauner, Max Ernst, Jacqueline Lamba, André Masson ou Wifredo Lam forment un groupe compact qui, en attendant les visas pour le nouveau monde, participe à des expériences collectives de cadavres exquis et crée ensemble le célèbre Jeu de Marseille. Si l’arrivée de certains de ces artistes à New York continue d’être décrite comme une révélation pour les jeunes artistes locaux, l’exposition montre que, depuis le début des années 1930, sur la côte Est aussi bien que sur la côte Ouest, des œuvres surréalistes ont été exposées et ont connu une grande popularité, faisant en particulier de Salvador Dalí une véritable star. Bien plus, elles ont fait des émules et conduit au développement d’un surréalisme proprement américain, avec des figures aussi importantes que Joseph Cornell ou celles largement méconnues des surréalistes sociaux new yorkais (comme O. Louis Guglielmi) et des post-surréalistes californiens (comme Helen Lundeberg).

Direction, 1945, Jackson Pollock, Venise, Musée Peggy Guggenheim.

L’exposition montre des œuvres surréalisantes des expressionnistes abstraits canoniques : Robert Motherwell, Barnett Newman, Jackson Pollock, Mark Rothko, David Smith ou Clyfford Still, au côté des tableaux semi-abstraits de Miró qui les ont influencés. Elle intègre aussi pleinement les marginaux du groupe, comme Richard Pousette-Dart ou Louise Bourgeois, qui mettaient constamment l’accent sur un contenu subjectif porté par des métaphores et des métamorphoses, ainsi que les œuvres abstraites surréalisantes créées sur la côte Ouest par les membres du collectif Dynaton (Gordon Onslow-Ford, Lee Mullican).

Prescience, 1939, Roberto Matta, Wandsworth Atheneum Museum of Art.

Regarder autrement les icônes de l’histoire de l’art moderne et reconsidérer le surréalisme et l’expressionnisme abstrait, notamment ce que le second doit au premier, tel est le parti pris de ce riche parcours composé de près de 180 œuvres et plus de 80 artistes. Met en évidence les riches collections surréalistes et post-surréalistes des musées français et américains ainsi que des collections privées. Déjà présente dans les années 1930, avant même l’arrivée à New York d’André Breton et sa clique, le surréalisme innerve la création, et c’est bien par sa capacité a libérer les formes et à s’en remettre à l’inconscient qu’il influence Robert Motherwell, Jackson Pollock, Mark Rothko ou Clyfford Still. Le surréalisme reste une force active jusque dans les années 1960, avec des artistes comme Wallace Berman, Bruce Conner, Jess ou le cinéaste Kenneth Anger.

Les Cinq étrangers, 1941, Yves Tanguy, Wadsworth Atheneum Museum of Art.